Les champagnes peuvent être étudiés selon plusieurs critères : - leur encépagement ( mono ou multi-cépage ) - leur origine de cru ( monocru ou assemblage, grand cru, 1er cru ) - leur millésime ( millésimé ou non millésimé ) - leur dosage ( de brut zéro à doux ) - leur couleur ( blanc ou rosé ) - leur pression ( brut ou crémant ) distinction qui n’a plus cours aujourd’hui Critères auxquels il convient d’ajouter le prix et le positionnement dans la gamme ( cuvée de base ou cuvée de prestige ). Tous ces critères peuvent évidemment se croiser. - selon le critère « encépagement » : Un champagne issu exclusivement de chardonnay sera nommé « blanc de blancs », ce qui signifie que sa couleur est blanche et qu’il est issu de raisins blancs. On trouve ces champagnes principalement dans la côte des blancs ( Avize, Cramant, Le Mesnil sur Oger…) et ils constituent parfois des cuvées de prestige ( Salon, Krug « Clos du Mesnil », Taittinger « Comtes de Champagne »,Deutz « amour de Deutz », Ruinart « Dom Ruinart »…) De même un champagne issu exclusivement de raisins noirs (pinot noir et pinot meunier) sera appelé « blanc de noirs » , ce qui signifie que sa couleur est blanche et qu’il est issu de raisins noirs. Ce type de champagne est plus rare. On le trouve principalement dans les villages de grands et premiers crus de pinot ( Bouzy, Aÿ…) et ils constituent parfois des cuvées de prestige. L’exemple le plus célèbre est le fameux « Vieilles Vignes Françaises » de Bollinger. C’est un champagne millésimé, aux tirages numérotés très limités( de l’ordre de 2500 bouteilles selon les millésimes ), issu de vignes de pinot noir non greffées, non attaquées par le phylloxéra et cultivées en foule. Généralement les « blancs de noirs » sont des 100% pinot noir, mais on trouve aussi quelques 100% pinot meunier (dont la maison José Michel est un « antiquaire », gardien de vieux millésimes ). Les champagnes qui ne sont ni des «blancs de blancs»,ni des «blancs de noirs» sont des assemblages soit de pinot noir et chardonnay, soit de chardonnay et pinot meunier, soit de pinot noir, pinot meunier et chardonnay. Ce sont les plus nombreux. - selon le critère « origine du cru » : Un champagne est appelé « grand cru » s’il est élaboré exclusivement avec des raisins originaires de vignobles de villages classés «grand cru». De même , un champagne est appelé premier cru s’il est constitué exclusivement de raisins de villages classés 1er cru (il peut également entrer dans sa composition une partie de raisins classés «grand cru»). Dans les deux cas la mention «grand cru» ou «premier cru» sur l’étiquette indique seulement le classement des villages dont sont originaires les raisins. Il peut donc s’agir d’un assemblage de raisins issus de différents villages classés. La mention du nom du village suivie de «grand cru» signifie par contre que seuls des raisins récoltés dans le vignoble de ce village sont employés. La nuance est importante car elle permet de mieux comprendre ce que l’on boit. Trop souvent les étiquettes laissent planer un doute sur l’origine des raisins. Ainsi un Champagne indiquant « Monsieur Dupont », propriétaire à Avize Grand cru ne signifie pas qu’il s’agit d’un Champagne grand cru d’Avize. Il faut pour cela l’indication claire sur l’étiquette « Monsieur Dupont , Avize grand cru ». La nuance est faible… - selon le critère « millésime » : Si le champagne est issu à 100% d’une seule récolte il peut être millésimé, bien que ce ne soit pas une obligation. Ainsi, de nombreux champagnes issus d’une seule récolte sont commercialisés en « BSA » (Brut Sans Année ) par des petits récoltants. Ceci s’explique principalement pour des raisons financières ( un millésimé ne peut être commercialisé qu’après un vieillissement de 36 mois en bouteille au lieu de 15 pour un BSA ) mais aussi de stratégie commerciale. Dans ce dernier cas, le récoltant millésime uniquement les vins issus de ses meilleures parcelles ou assemblages. Il arrive donc fréquemment que l’on boive des champagnes « BSA » qui sont des millésimés de fait. Si le champagne n’est pas millésimé il résulte alors d’un assemblage de plusieurs récoltes, deux ou trois le plus souvent. Le critère de millésime est très particulier en Champagne, il n’a pas la même notion que dans les autres vignobles où un grand vin ne se conçoit que millésimé. En Champagne l’art de l’assemblage vient estomper l’impact du millésime. Dans l’absolu, l’assemblage de millésimes devrait être supérieur en qualité car il permet une infinité de combinaisons au même titre que l’assemblage de crus ou de parcelles qui fait le prestige des grandes cuvées. - selon le critère « dosage » : Cet aspect a été vu dans le chapitre concernant l’élaboration du champagne. Brièvement, les champagnes, selon leur teneur en sucre résiduel, peuvent être extra-bruts, bruts, secs, demi-secs ou doux. Dans la pratique, pour les champagnes de qualité, on trouve essentiellement des bruts, un peu d’extra-bruts et quelques demi-secs. - selon le critère « couleur » : Il n’existe pas officiellement de champagnes rouges. Ils sont donc soit blancs, soit rosés. Rappelons que les champagnes sont des vins blancs alors qu’ils proviennent souvent de raisins noirs. L’explication vient de la technique de pressurage et donc de la très courte macération des jus au contact des peaux ce qui empêche le jus de se teinter. Le champagne rosé est obtenu, parfois, par un contact plus long du jus avec les peaux jusqu’à obtenir la teinte rosée désirée qui peut aller d’un rose-orangé pâle à un rose soutenu. Il s’agit de rosés dits «de saignée». Cette technique est celle utilisée dans les autres vignobles où l’on élabore des vins rosés. Mais la Champagne a une autre particularité : celle de pouvoir élaborer des rosés à partir de l’adjonction d’un petit pourcentage de vin rouge à du vin blanc, ce qui est interdit ailleurs. Dans ce cas les cépages noirs sont vinifiés classiquement en vin rouge et ils sont incorporés lors de l’étape de l’assemblage. Cette méthode est la plus répandue en Champagne, sans doute parce qu’elle apporte au vigneron une grande souplesse dans le choix des vins qu’il pourra utiliser pour élaborer ultérieurement son rosé. Curieusement, certaines cuvées de champagne rosé sont élaborées selon l’une ou l’autre technique en fonction des caractéristiques de l’année. C’est le cas du rare et coûteux «Dom Pérignon» rosé par exemple. - selon le critère « pression » : Ce critère n’est plus usité aujourd’hui. Il avait son importance à l’époque où les «crémants» existaient légalement. Un champagne était alors soit « brut », dans ce cas il avait une pression de 6 atmosphères, soit «crémant» et alors la pression n’était plus que de 3,6 atmosphères. Du fait de la pression moindre leur mousse était plus crémeuse. Si l’emploi du mot «crémant» est désormais interdit en Champagne certains champagnes continuent à l’être sans l’afficher. Le cas le plus connu est le «Cramant de Mumm» qui est le successeur inchangé du «Crémant de Cramant» de Mumm. L’expression crémant de Cramant signifiant alors qu’il s’agissait d’un Champagne de type «crémant» issu du vignoble grand cru de Cramant. - selon le critère « cuvée de prestige » : Ce critère est uniquement un critère de positionnement marketing d’une gamme de champagnes au sein d’une maison. Les cuvées de prestige représentent le haut de gamme et sont issues des meilleurs vignobles et des meilleurs millésimes. Elles sont souvent logées dans des bouteilles spéciales et bénéficient d’un habillage et d’une présentation en coffret plus flatteurs. Les prix de vente sont en conséquence élevés. L’un des premiers spécimens de ces cuvées de prestige, et le plus connu, est historiquement en 1876 la cuvée "Cristal" de la maison Roederer, qui était réservée au tsar Alexandre ll et dont la particularité était d'être livrée dans des flacons en cristal, d’où son nom. Son célèbre flacon, en verre désormais, à un fond plat. Pour les clients le premier millésime de "Cristal" a été le 1924 commercialisé au début des années 1930. Sa version rosée a vu le jour avec le millésime 1974.
Sur le plan commercial , il s’agit de la cuvée «Dom Pérignon» de Moët et Chandon. Pour information voici un récapitulatif du premier millésime commercialisé de quelques grandes cuvées de prestige : - Moët et Chandon « Dom Pérignon» millésime 1921 - Veuve Clicquot « La Grande Dame » millésime 1969 - Ruinart « Dom Ruinart » millésime 1959 - Perrier-Jouët « Belle Epoque » millésime 1964 - Taittinger « Comtes de Champagne » millésime 1952 - Bollinger « Vieilles Vignes Françaises » millésime 1969 - Bollinger "R.D." millésime 1952 - Krug « Clos du Mesnil » millésime 1979 - Krug « Clos d’Ambonnay » millésime 1995 - Pol Roger « Cuvée Sir Winston Churchill » millésime 1975 - Pommery "Cuvée Louise Pommery" millésime 1979 Certaines cuvées de prestige ne sont pas millésimées et résultent d’un assemblage. Citons la cuvée «Grand siècle» de Laurent-Perrier, assemblage de trois millésimes ,quoiqu’elle soit parfois exceptionnellement millésimée comme en 1985 ou en 1990, le Krug «Grande cuvée» ou, exemple encore plus frappant, l’originale cuvée «Substance» d’Anselme Selosse. Celui-ci a imaginé un champagne élaboré selon la technique de la «Soléra», où chaque année une partie de la vendange du grand cru Avize vient se fondre avec les vins des précédentes récoltes dans une cuve. Chaque année voit donc l’assemblage prendre de l’âge ce qui fait évoluer le style de cette cuvée unique en Champagne et dont tous les «tirages» sont différents. Dans ce cas, l’indication de la date de dégorgement au dos de la bouteille est la seule indication de référence.